L’ordre international, c’est le respect des règles

Alfred de Zayas
(Photo mad)

par Alfred de Zayas,* Genève

(23 février 2024) Lorsque huit milliards d’êtres humains doivent vivre sur une planète commune, il est nécessaire d’établir des règles du jeu, un certain modus vivendi pour éviter le chaos et la violence. Des règles cohérentes permettent un développement local, régional et international pacifique, fondé sur la coopération plutôt que sur la confrontation. Ces règles doivent être observées de bonne foi. La tricherie n’est pas permise.1 Les doubles standards détruisent la confiance que nous plaçons dans les institutions qui administrent les règles.

«The Knotted Gun» (1984), une sculpture contre la violence, devant
le siège de l'ONU à New York. (Photo mad)

Au XXIe siècle, nous connaissons de multiples ordres fondés sur des règles. Au niveau international, nous avons la Charte des Nations Unies, qui s’apparente à une Constitution mondiale. Les agences des Nations Unies telles que l’OIT, l’UNESCO et l’OMS ont leurs propres constitutions et organes d’exécution. Les ordres régionaux sont basés sur des traités, par exemple la Charte de l’Organisation des Etats américains, les Traités de Lisbonne et de Maastricht pour l’Union européenne, la Charte de l’Union africaine, etc.

Les organes subsidiaires ont également leurs statuts ou leurs «mandats», comme la Cour internationale de justice, qui est entrée en vigueur le 24 octobre 1945, en même temps que la Charte des Nations Unies, ou la Cour pénale internationale, qui fonctionne sur la base du Statut de Rome de juillet 1998. Le Conseil des droits de l’homme travaille sur la base d’une résolution de l’Assemblée générale de 2006, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la base d’une résolution de l’Assemblée générale de 1993.2

Tous les ordres internationaux et régionaux ont en commun l’engagement de tous les Etats membres à respecter les règles établies. L’appel d’Antony Blinken en faveur d’un «ordre international fondé sur des règles» est redondant, car nous disposons déjà de la Charte des Nations Unies, dont l’article 103, la clause de suprématie, stipule que la Charte a priorité sur tous les autres «ordres» tels que les traités de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et les Traités de l’Union européenne. Cette clause peut être modifiée, mais uniquement en vertu d’un amendement à la Charte selon son article 108.

L’autorité et la crédibilité de tous les «ordres» et de toutes les organisations créées pour mettre en œuvre l’«ordre» convenu dépendent de l’application uniforme des normes et de l’exécution de bonne foi de l’«objet et du but» des organisations. Dans cet essai, j’illustrerai certains problèmes qui affectent le travail de deux institutions importantes des Nations Unies – le Conseil des droits de l’homme et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

Le Conseil des droits de l’homme

En mars 2006, l’Assemblée générale des Nations Unies a décidé de créer le Conseil des droits de l’homme pour remplacer la Commission des droits de l’homme, très décriée. Lors de l’adoption de la résolution, l’ambassadeur suisse auprès des Nations Unies de l’époque, Peter Maurer, l’a saluée comme un «bon compromis» qui créait un cadre pour un «nouveau départ», pour explorer de nouvelles formes d’engagement, et offrait une opportunité de construire la confiance, en abordant les droits de l’homme dans un esprit d’équité, d’égalité de traitement et d’évitement des «deux poids deux mesures». M. Maurer a ajouté: «Nous espérons sincèrement que nous ne retomberons pas dans nos vieux schémas de comportement».

Puis il a lancé un avertissement: «Nous ne partageons pas les approches intransigeantes et maximalistes de certaines délégations, qui veulent nous faire croire qu’elles sont les seules à se battre pour des mécanismes ambitieux en matière de droits de l’homme. Trop souvent, les grandes ambitions cachent des objectifs moins nobles et visent, non pas à améliorer les Nations Unies, mais à les rabaisser et à les affaiblir.» Il a souligné que l’adoption de la résolution de l’Assemblée générale constituait un résultat stratégique important pour le processus global de réforme des Nations Unies, ajoutant: «En fait, le changement est un processus, pas un événement.»

Ma propre expérience de la Commission des droits de l’homme en tant que collaborateur du Haut-Commissariat aux droits de l'homme (HCDH) pendant plus de deux décennies, et du nouveau Conseil en tant que premier Expert indépendant de l’ONU sur l’ordre international (2012–2018) confirme les préoccupations exprimées par l’ambassadeur Maurer. J’oserais dire que le nouveau Conseil a moins d’autorité et de crédibilité que la Commission, et que la militarisation des droits de l’homme a atteint de nouveaux sommets au sein du Conseil. Les doubles standards ne sont pas l’exception, mais le quotidien de la maison.

La pratique du «nommer et dénoncer» [«naming and shaming»] empoisonne fréquemment l’atmosphère du Conseil, précisément en raison de sa qualité de confrontation, qui ne laisse aucune place à un dialogue honnête avec une volonté de parvenir à des solutions basées sur la bonne volonté et le bon sens. Actuellement, l’examen périodique universel des rapports des Etats et des titulaires de mandat dans le cadre des procédures spéciales se caractérise par des invectives et des allégations dépourvues de preuves.

Ce qu’il faut, c’est un Conseil qui s’efforce d’identifier les causes profondes des problèmes et qui soit capable de formuler des stratégies préventives et correctives concrètes. La pratique trop répandue du «nommer et dénoncer», préconisée par certaines délégations et même par des organisations non gouvernementales telles qu’Amnesty International et Human Rights Watch – qui devraient être mieux informées – s’est avérée largement contre-productive,3 car le plus souvent les pays qui se livrent à ce «nommer» ont ont de nombreux cadavres dans leurs placards,4 et les pays «nommés» n’ont aucune envie d’accepter les récits biaisés présentés au Conseil par leurs accusateurs et par leurs assistants complices au sein de la communauté des ONG. Ainsi, la «tactique» consistant à pointer du doigt se retourne contre les gouvernements visés et les pousse à se replier sur eux-mêmes plutôt qu’à s’ouvrir.

Ce dont nous avons besoin, c’est de services consultatifs et d’une assistance technique efficaces, d’un Haut-Commissariat aux droits de l’homme proactif qui montre aux gouvernements comment éliminer les obstacles à la jouissance des droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux par les personnes placées sous leur juridiction.

En 2006 déjà, l’ambassadeur cubain Rodrigo Malmierca Díaz avait exprimé l’espoir que le nouveau Conseil ne soit pas victime de la «manipulation politique, de l’hypocrisie et de la politique de deux poids deux mesures imposées à ses travaux par les Etats-Unis et l’Union européenne». L’ambassadeur Malmierca a observé que le nouveau Conseil n’était en aucun cas une réponse suffisante pour relever ce défi et que rien dans la création du nouveau Conseil n’empêcherait une répétition de la tradition de manœuvre des puissances du Nord pour condamner injustement les pays du tiers-monde.5

Cuba avait proposé la création d’un organe qui contribuerait à renforcer le système international de promotion et de protection des droits de l’homme, par le biais d’une véritable coopération, mais les Etats-Unis et leurs alliés ont insisté pour faire prévaloir l’approche «punitive et sanctionnatrice», cette fois-ci illustrée par une disposition du texte, permettant de suspendre les droits de quiconque remet en question, interfère ou est simplement en désaccord avec les «plans de domination hégémonique de l’Empire».

En ce qui concerne les procédures spéciales, le Conseil serait plus performant s’il se concentrait sur des mandats thématiques tels que le rapporteur sur la torture, la violence contre les femmes, l’indépendance des juges et des avocats, le droit à l’alimentation, le droit à la santé, le droit au développement, etc. et s’il supprimait progressivement les mandats par pays hostiles, qui tendent le plus souvent à exacerber les choses.

Les mandats nationaux sont judicieux si l’objectif du mandat est d’aider le pays à améliorer ses performances en matière de droits de l’homme par le biais de services de conseil et d’assistance technique, en examinant de bonne foi les causes profondes des griefs et en s’efforçant de trouver des solutions viables. Les mandats nationaux sont une perte de temps et de ressources lorsque les pays concernés refusent de coopérer avec le rapporteur national, qui est perçu – parfois avec de bonnes raisons (je pourrais citer de nombreux exemples) – comme ayant a priori un parti pris contre eux.

Lorsqu’un pays se sent «pris à partie» et injustement visé, il ne se conformera certainement pas aux recommandations d’un rapporteur ou d’une «commission d’établissement des faits». En effet, d’autres pays dont le bilan en matière de droits de l’homme est objectivement plus mauvais échappent à l’examen et ne font pas l’objet d’une mise à l’index dans l’incarnation institutionnelle d’un rapporteur.

Il est essentiel que le HCDH et le Conseil des droits de l’homme respectent un code de déontologie et n’appliquent jamais, je dis bien jamais, deux poids deux mesures. L’autorité et la crédibilité du HCDH et du Conseil des droits de l’homme dépendent du professionnalisme de son personnel et de l’objectivité de sa méthodologie.6 Il n’est pas acceptable de se concentrer uniquement sur les violations commises par certains pays et de passer sous silence les violations commises par d’autres pays, notamment les grands donateurs du HCDH.

Il est de la responsabilité des Etats, et pas seulement des 47 Etats membres du Conseil, de veiller à ce que le Conseil soit dépolitisé, qu’il place les gens au centre de ses préoccupations, qu’il formule des propositions constructives et qu’il établisse des mécanismes de suivi. Si l’Examen périodique universel est utile, il ne doit pas faire double emploi avec le travail des organes de traités des Nations Unies, tels que le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels. En outre, il ne doit pas être un simple rituel diplomatique et une occasion pour certains pays de faire avancer des agendas géopolitiques et de marquer des points contre d’autres Etats. En ce qui concerne les procédures spéciales, les rapporteurs et les experts indépendants doivent respecter rigoureusement le code de conduite prévu par la résolution 5/2 du Conseil.

L’ordre international passe par la coopération internationale

Le principe clé de l’ordre international doit être le principe de coopération sur la base de la Charte des Nations Unies, de la reconnaissance de l’égalité souveraine des Etats et de l’autodétermination des peuples. Commençons par rappeler l’engagement de tous les Etats, en vertu de l’article 55 de la Charte des Nations Unies, de coopérer les uns avec les autres pour réaliser la paix et les droits de l’homme:

«En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront: […] la solution des problèmes internationaux dans les domaines économique, social, de la santé publique et autres problèmes connexes, et la coopération internationale dans les domaines de la culture intellectuelle et de l’éducation.»

De nombreuses résolutions et déclarations de l’ONU soulignent l’importance de la coopération internationale. La Déclaration de Vienne et le Programme d’action de 1993 réaffirment dans leur préambule «l’engagement pris à l’article 56 de la Charte des Nations Unies d’agir tant conjointement que séparément, en accordant l’importance qu’il mérite au développement d’une coopération internationale efficace7 Le paragraphe 4 du dispositif stipule en outre:

«La promotion et la protection de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales doivent être considérées comme un objectif prioritaire de l’Organisation des Nations Unies conformément à ses buts et principes, eu égard en particulier à l’objectif de coopération internationale.

Eu égard à ces buts et principes, la promotion et la protection de tous les droits de l’homme sont une préoccupation légitime de la communauté internationale. Les organes et les institutions spécialisées s’occupant des droits de l’homme doivent donc renforcer encore la coordination de leurs activités en se fondant sur application uniforme et objective des instruments internationaux en la matière.»

Le paragraphe 10 du dispositif réaffirme le droit au développement et stipule que «les Etats devraient coopérer pour assurer le développement et éliminer les obstacles qui s’y opposent. La communauté internationale devrait promouvoir une coopération internationale efficace pour éliminer ces obstacles et réaliser le droit au développement.»

Les paragraphes 5 et 6 du document final du Sommet mondial de 2005, Res. 60/1, soulignent l’importance du multilatéralisme et de la coopération internationale.

«Nous sommes résolus à instaurer une paix juste et durable dans le monde entier conformément aux buts et aux principes énoncés dans la Charte. Nous réaffirmons notre volonté de tout faire pour défendre l’égalité souveraine et le respect de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de tous les Etats, de nous abstenir de recourir dans les relations internationales à la menace ou à l’emploi de la force en violation des buts et principes des Nations Unies et de promouvoir le règlement des différends par des moyens pacifiques et conformes aux principes de la justice et du droit international, le droit de disposer d’eux-mêmes qui appartient aux peuples encore sous domination coloniale ou sous occupation étrangère, le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats, le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, le respect de l’égalité des droits de tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion, la coopération internationale en vue du règlement des problèmes internationaux d’ordre économique, social, culturel ou humanitaire et l’exécution de bonne foi des obligations assumées aux termes de la Charte.

6. Nous réaffirmons l’importance vitale d’un système multilatéral efficace fondé sur le droit international pour mieux affronter les menaces et défis multiformes et interdépendants auxquels le monde doit faire face ...»

Le paragraphe 48 souligne l’importance du droit au développement.

«Nous réaffirmons notre volonté d’atteindre l’objectif du développement durable, notamment en mettant en œuvre Action 21 et le Plan de mise en œuvre de Johannesburg. A cette fin, nous nous engageons à prendre des décisions et mesures concrètes à tous les niveaux et à renforcer la coopération internationale, en tenant compte des principes de Rio8

Dans ce contexte, il est également pertinent de rappeler le libellé du projet révisé de Déclaration des Nations Unies sur le droit à la solidarité internationale,9 qui développe le projet original contenu dans le rapport de 2017 de la Rapporteuse spéciale du Conseil des droits de l’homme sur la solidarité internationale, Virginia Dandan.10

L’article 1 stipule

«La solidarité internationale est l’expression d’un esprit d’unité par laquelle les peuples et les individus jouissent des avantages d’un ordre international pacifique, juste et équitable, garantissent leurs droits de l’homme et assurent un développement durable. 2. La solidarité internationale est un principe fondamental qui sous-tend le droit international contemporain afin de préserver l’ordre international et d’assurer la survie de la société internationale. 3. Le concept de solidarité internationale est fondé sur les principes ci-après, avec lesquels il est en conformité: (a) la justice, l’équité, la paix, la non-ingérence, l’autodétermination, le respect mutuel et la responsabilité dans les relations internationales […].»

L’article 3 stipule

«L’objectif général de la solidarité internationale est de créer un environnement propice pour: 1. promouvoir la réalisation et la jouissance de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales; 2. créer la confiance et le respect mutuel pour promouvoir la paix et la sécurité, de promouvoir la réaction rapide et la prévention des conflits, de fournir une assistance humanitaire et de participer à la consolidation de la paix ...»

L’article 7 stipule

«Les Etats s’engagent à coopérer entre eux et avec les acteurs non étatiques pour mettre en œuvre le droit à la solidarité internationale afin de prévenir et de surmonter les défis mondiaux. […] 4. Les Etats conviennent de prendre des mesures appropriées, transparentes et inclusives pour assurer la participation active, libre et significative de tous les individus et de tous les peuples, y compris les jeunes générations, aux processus de prise de décision aux niveaux national, bilatéral, régional et international sur les questions qui touchent à la jouissance de la solidarité. 5. Les Etats conviennent d’adopter et de mettre en œuvre efficacement des politiques et des programmes, tant au niveau national que transnational, afin de promouvoir et de protéger la solidarité fondée sur la diversité culturelle, l’engagement et l’échange.»

En tant qu’expert indépendant sur l’ordre international, j’ai participé à la rédaction de ce document et j’ai plaidé en faveur de son adoption par l’Assemblée générale. Il est honteux qu’à ce jour, la Déclaration sur le droit à la solidarité internationale n’ait pas été adoptée, bien qu’elle exprime avec éloquence les principes les plus nobles de la Charte des Nations Unies. Qui s’oppose à cette déclaration? Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et les Etats membres de l’Union européenne. Dans ce contexte, il est instructif d’étudier les résultats des votes sur de nombreuses résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil des droits de l’homme. Cela révélera qui est réellement en faveur d’un ordre international fondé sur des règles, et qui est en fin de compte opposé à l’égalité souveraine des Etats et aux droits de l’homme pour tous les membres de la famille humaine.11

Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme

Il est opportun de se pencher sur le mandat du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. Faisant suite aux recommandations de la Conférence mondiale de Vienne sur les droits de l’homme, l’Assemblée générale a adopté, le 20 décembre 1993, la résolution 48/141 créant le mandat du Haut-Commissaire aux droits de l’homme. Dans son préambule, la résolution rappelle «que l’un des buts des Nations Unies, consacré par la Charte, est de réaliser la coopération internationale en développant et en encourageant le respect des droits de l’homme». Au paragraphe 4 du dispositif, la résolution énumère les responsabilités du Haut-Commissaire, notamment celle de «renforcer la coopération internationale pour la promotion et la protection de tous les droits de l’homme».12

Selon son mandat, la raison d’être du Haut-Commissariat aux droits de l’homme est de faire progresser les droits de l’homme par la coopération internationale, les services consultatifs et l’assistance technique. Il est regrettable que le secrétariat du HCDH et le Conseil des droits de l’homme semblent avoir oublié cette vocation essentielle du mandat et préfèrent s’engager dans une politique de confrontation.

Cela ne veut pas dire que le HCDH et le Conseil des droits de l’homme doivent garder le silence sur les violations des droits de l’homme où qu’elles se produisent. Mais la condamnation des abus et des crimes commis par les gouvernements ne peut être l’objet et le but du HCDH et du Conseil des droits de l’homme. Il est essentiel que l’effort commun pour faire progresser la jouissance des droits de l’homme ne se limite pas à la rhétorique et aux vœux pieux en faveur de la dignité humaine. Le Conseil des droits de l’homme s’est avéré largement inefficace parce qu’il n’est pas un forum de dialogue civilisé, mais plutôt une arène de gladiateurs où les couteaux sont sortis et où il n’y a pas de médecins.

Obstacles à la coopération internationale

Parmi les nombreux obstacles à la paix et à la coopération internationale, il y a la guerre de l’information en cours, le niveau très élevé de fausses nouvelles, de fausses histoires et de fausses lois diffusées par des médias complices qui agissent comme une chambre d’écho pour les gouvernements.13

Dans les paragraphes ci-dessus, j’ai mis en évidence certains problèmes dans le fonctionnement de l’Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme, notamment l’approche conflictuelle au lieu de la coopération basée sur la Charte des Nations Unies. Les doubles standards détruisent l’autorité et la crédibilité des institutions. La «militarisation des droits de l’homme» signifie que les droits de l’homme sont instrumentalisés comme des armes pour attaquer d’autres pays. Cette corruption d’un noble principe humaniste équivaut à un blasphème et à un sacrilège.

Conclusions et recommandations

Je propose que les mandats thématiques du Conseil des droits de l’homme soient renforcés et que les mandats de confrontation par pays soient progressivement abandonnés. Tous les titulaires de mandat de l’ONU doivent respecter rigoureusement le code de conduite (résolution 5/2). Un code de conduite pour les ONG devrait être rédigé et adopté par l’Assemblée générale. Les ONG qui violent leur code de conduite devraient être rapidement privées de leur statut consultatif, en particulier lorsqu’elles se sont livrées à des attaques ad hominem ou ont diffusé des allégations dénuées de preuves.

Les procédures de l’EPU devraient être révisées afin d’éviter les doubles emplois et de garantir un débat constructif, tout en évitant la tactique pétulante et hypocrite qui consiste à «nommer et dénoncer». La méthode de nomination des rapporteurs devrait être révisée afin de garantir que les meilleurs candidats soient sélectionnés et non les candidats «politiquement corrects», et pas seulement les candidats centrés sur les Etats-Unis et l’Europe (quelle que soit leur nationalité).

Il est essentiel de démocratiser les «procédures spéciales» du Conseil des droits de l’homme en veillant à ce qu’il y ait non seulement un équilibre entre les hommes et les femmes, mais aussi un équilibre entre les approches et les philosophies juridiques. Il conviendrait de créer un «Observatoire» chargé de veiller à ce que les débats ne fassent pas l’objet d’un double standard, une sorte de «surveillance contre les deux poids deux mesures».

Une procédure de suivi devrait être mise en place pour vérifier si les recommandations des rapporteurs sont réellement suivies, ou si les rapporteurs ne sont qu’une assemblée de «insulteurs et calomniateurs» bruyants ou, pire encore, des cassandres non pertinentes.

En résumé, l’ordre international est synonyme de coopération internationale. Cela implique de la bonne volonté, qui fait actuellement défaut. Cela implique un engagement à respecter les mêmes règles et à ne pas constamment essayer de profiter de l’autre.

La société civile devrait contribuer à la redécouverte de la spiritualité de la Déclaration universelle des droits de l’homme et exiger de ses gouvernements qu’ils canalisent leurs instincts tribaux vers des paradigmes de coopération constructive. Je ne peux m’empêcher de penser à «Sapiens» et «Homo Deus» de Yuval Noah Harari. En effet, si nous voulons survivre au XXIe siècle, nous ferions mieux de nous ressaisir et de redécouvrir les avantages de la coopération et du compromis.

* Alfred de Zayas est professeur de droit à la Geneva School of Diplomacy et a été expert indépendant de l'ONU sur l'ordre international de 2012 à 18. Il est l'auteur de dix livres dont «Building a Just World Order» Clarity Press, 2021.

Source: https://www.counterpunch.org/2024/01/19/international-order-means-playing-by-the-rules/, 19 janvier 2024

(Traduction «Point de vue Suisse»)

1 See «A Culture of Cheating» https://www.counterpunch.org/2022/01/28/a-culture-of-cheating-on-the-origins-of-the-crisis-in-ukraine/

2 https://undocs.org/Home/Mobile?FinalSymbol=A%2FRES%2F48%2F141&Language=E&DeviceType=Desktop&LangRequested=False

3 https://publicseminar.org/essays/why-naming-and-shaming-is-a-tactic-that-often-backfires-in-international-relations/ and https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/1369148120948361

4 https://www.ohchr.org/en/statements/2013/11/statement-alfred-maurice-de-zayas-independent-expert-promotion-democratic-and

5 https://press.un.org/en/2006/ga10449.doc.htm

6 See Chapters 2 and 3 of Alfred de Zayas, The Human Rights Industry, Clarity Press, 2023. https://www.claritypress.com/product/building-a-just-world-order/

7 https://www.ohchr.org/sites/default/files/documents/events/ohchr20/vdpa_booklet_fr.pdf

8 https://undocs.org/Home/Mobile?FinalSymbol=A%2FRES%2F60%2F1&Language=E&DeviceType=Desktop&LangRequested=False

9 https://www.ohchr.org/sites/default/files/documents/issues/solidarity/reviseddraftdeclarationrightInternationalsolidarity.pdf

10 Annex to Report A/HRC/35/35. https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G17/099/39/PDF/G1709939.pdf?OpenElement

11 A de Zayas, The Human Rights Industry, Chapter 8, “The Bottom Line”, Clarity Press, 2023.

12 https://undocs.org/Home/Mobile?Final

13 A de Zayas, chapter 7 The Human Rights Industry, Clarity Press, 2023.

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